Pourquoi je vous en parle ici : Voilà encore un sujet autour de la maternité dont on ne parle pas. Aucune femme ne se confie – ou si peu – sur ses difficultés à avoir un enfant, sur ses doutes, ses inquiétudes, ses questionnements. Tout cela reste dans la sphère du couple, voire parfois simplement dans son esprit à elle, alors qu’en parallèle, elle subit bien souvent les injonctions et questions inappropriées de son entourage : «Alors c’est pour quand ?», «Il ne va pas rester enfant unique ce petit garçon ?» ou encore «Vous avez perdu le mode d’emploi ?». C’est donc à ce tabou qu’a décidé de s’attaquer l’auteure, scénariste et comédienne Maud Bettina-Marie dans son livre T’attendre*. En s’inspirant de son histoire personnelle, elle nous plonge avec émotion, douceur mais aussi humour dans l’intimité du désir de maternité de Maxime, son héroïne, qui n’arrive pas à tomber enceinte de son deuxième enfant. Ecrit sous la forme d’une correspondance à ce futur bébé, ce livre nous invite à découvrir le tourbillon émotionnel qu’entraîne une telle épreuve pour une femme. Ou quand le désir de maternité vire à l’obsession. Interview.
Vous venez de publier T’attendre (éditions First) qui raconte l’histoire de Maxime et de ses difficultés à concevoir son second enfant. C’est un roman, qui a toutefois des similitudes avec votre vie personnelle. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Maud BETTINA-MARIE – En effet, j’aime inventer des histoires même si au départ, l’inspiration vient de ma vie. Cela fera deux ans en septembre que nous essayons de faire un deuxième enfant avec mon compagnon. Au départ, je ne savais pas à quel point l’attente pouvait être insupportable, surtout quand on n’a pas d’explications même si j’ai une endométriose dormante. Mais selon mon médecin, ce n’est pas l’unique cause car je suis tombée enceinte trois fois (Maud Bettina-Marie a un enfant et a fait deux fausses-couches, ndlr).
Les médecins me parlent d’«infertilité inexpliquée», ce qui est la pire pour moi qui ait besoin de contrôle, car je n’ai aucune prise dessus. J’ai commencé à vraiment m’inquiéter au bout de 8/9 mois d’attente et j’ai fait des tests pour comprendre ce qu’il se passait au bout d’un an. Mais mon histoire n’est pas la même que Maxime, mon héroïne, qui rencontre des difficultés avec son conjoint que je n’ai pas connues et qui a une histoire familiale qui a laissé des traces.

Comment vous est venue l’idée d’écrire T’attendre ?
J’ai décidé de faire quelque chose de ce que je ressentais le jour où j’ai été aussi dévastée que Maxime dans la buanderie… C’était un nouveau matin de règles. Alors que je n’assumais jusque-là pas ma tristesse à chaque nouvel échec, ce jour-là j’ai accepté de la laisser éclater et j’ai décidé de la déverser sur du papier. Ce livre, qui raconte le ressenti d’une femme qui n’arrive pas à avoir d’enfant et les émotions intenses qu’elle traverse, a été comme une thérapie. Il n’a pas enlevé ma tristesse, mais je ne suis plus autant dévastée. Il m’a permis de réaliser que c’est une chance d’être 3 et d’être heureux à 3.
Pourquoi est-ce si dur selon vous pour les femmes de parler de leurs difficultés à tomber enceinte ?
L’infertilité est un sujet tabou pour plein de raisons. La femme est faite pour enfanter et pas pour galérer. D’ailleurs, à une époque, les femmes infertiles étaient rejetées de leur famille. La nature est faite comme ça, donc quand on n’y arrive pas, on ne le crie pas sur la place publique, surtout dans notre société de la performance…
Qu’est-ce qu’on pourrait faire selon vous pour améliorer la prise en charge médicale des femmes qui rencontrent ces difficultés de conception ?
Les médecins pourraient commencer par signaler qu’on peut être suivi psychologiquement, ça peut aider. Il faudrait aussi faire comprendre aux femmes qu’elles ont encore le pouvoir sur leur corps malgré tout le protocole et le suivi imposé car c’est dur de se sentir dépossédée. Enfin, il faut se méfier du business qui existe autour de l’infertilité. C’est important de garder son pouvoir de décision, de bien se renseigner via les avis google par exemple, pour ne remettre son corps tout entier entre les mains de quelqu’un qui pourrait en faire ce qu’il veut.
Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui traversent aussi cette épreuve ?
Il faut tenter de lâcher prise par le moyen qui nous correspond le mieux, une activité physique par exemple, un sport, etc. Ensuite, il ne faut pas oublier ce qu’on a autour de nous : un compagnon aimant, un premier enfant, un métier qu’on adore, etc… Il y a ce mantra que je cite dans le livre et qui valable pour tout : «Ce que tu désires ne doit pas te faire oublier ce que tu as». Il n’enlève pas la tristesse mais aide à accepter ce qu’on traverse. Enfin, il faut être indulgente envers soi-même, il n’y a pas de honte à vivre ça et à parfois être déçue quand une amie nous annonce sa grossesse. Cela ne fait pas nous des mauvaises personnes, mais simplement des humains.
*T’attendre, Maud Bettina-Marie, aux éditions First.
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